Perguntam-me não raras vezes:
- "Qual o livro de José Saramago que mais gostaste de ler?"
A resposta que pode ser dada a cada momento:
- "Impossível de dizer... não sei responder, não seria justo para com outros (livros) não nomeados. Mas uma coisa sempre soube. Uma obra de Saramago, enquanto "pseudo ser vivo" ou com "gente dentro" tem que me raptar, prender-me, não me deixar sair de dentro das suas páginas. Fazer de mim um refém, e só me libertar no final da leitura... mesmo ao chegar à última página. Aí, o "Eu" leitor que se mantém refém, liberta-se da "gente que a obra transporta dentro" e segue o seu caminho.
Mas segue um caminho que se faz caminhando, conjuntamente com mais uma família"

Rui Santos

quinta-feira, 10 de março de 2016

José Saramago : «Il faudrait réformer la démocratie» - Lucie Geffroy entrevista José Saramago para o "L’Orient Littéraire" (02/08/2007)

"Primeiro, gosto das mulheres. Penso que elas são mais fortes, mais sensíveis e que elas têm mais bom-senso do que os homens. Todas as mulheres do mundo não são assim, mas digamos que é mais fácil encontrar qualidades humanas nelas do que no género masculino. Todos os poderes políticos, económicos, militares são um negócio de homem. Durante séculos, a mulher teve de pedir licença ao seu marido ou ao seu pai para empreender o que quer que fosse. Como pudemos viver tanto tempo a condenar a metade da humanidade à subordinação e à humilhação?"
"José Saramago: ‘Il faudrait réformer la démocratie"
”, L’Orient le Jour, Beirute, 2 de agosto de 2007 - Entrevista realizada por Lucie Geffroy

Fotografia © Hannah / Opale

A entrevista pode ser aqui consultada, via
http://www.lorientlitteraire.com/article_details.php?cid=6&nid=5853

"Aux points cardinaux d’une bibliographie épaisse, éclectique et baroque, on compte un roman culte, Le dieu manchot, un vibrant hommage à Pessoa (L’année de la mort de Ricardo Reis), une version subversive de l’Évangile (L’Évangile selon Jésus-Christ) et une fable toute kafkaïenne (Tous les noms). La lucidité, son dernier roman traduit en français, une fois de plus mené tambour battant avec des dialogues qui s’enchaînent sans guillemets et un récit qui bascule brutalement dans le fantastique, est un autre livre de colère où l’auteur s’insurge cette fois-ci contre la prétendue démocratie... Avec la simplicité qui caractérise les grands hommes, José Saramago a reçu L’Orient Littéraire dans sa petite maison de Lisbonne. À 84 ans, il n’a rien perdu de son mordant.

Vous avez dit de La lucidité, traduit en français fin 2006, qu’il s’agissait de votre livre le plus subversif. Pourquoi ? 
Dans nos sociétés, les hommes politiques et les médias ont beaucoup de motifs de se taire. Certains sujets sont comme entourés d’une enveloppe de silence. La briser, c’est faire acte de subversion. Avec La lucidité où j’imagine que 80% des électeurs votent blanc, on a pensé que j’étais favorable à la généralisation du vote blanc et donc un ennemi de la démocratie. Je ne fais pas l’apologie du vote blanc. Je dis seulement qu’il est important de le distinguer de l’abstention. Les gens qui votent blanc prennent le soin de sortir de chez eux, de se déplacer et de déposer un bulletin qui signifie : ce que vous me proposez ne m’intéresse pas. En France, le vote blanc est considéré comme nul. Je trouve cela scandaleux !

Justement, votre roman peut se lire comme une critique acerbe d’un système démocratique en décadence. La démocratie est-elle en danger selon vous ? 
Non, elle n’est pas en danger, mais elle est amputée, dévoyée. Elle est devenue une comédie. Les candidats font des promesses et les oublient aussitôt. Ce n’est pas vrai que nous vivons en démocratie. Nous nageons en pleine ploutocratie. Or le citoyen est la première victime du mensonge généralisé. Qu’est-ce que la guerre en Irak, sinon un énorme mensonge ? Nous vivons à une époque où l’on peut discuter de tout sauf de la démocratie. Qu’est-elle devenue ? À quoi sert-elle ? Si on se posait ces questions, on arriverait à la conclusion qu’il faudrait sans doute la réformer. Aristote avait établi que dans un système démocratique, le Parlement devait être composé d’une majorité de pauvres et d’une minorité de riches. Maintenant, je me dis qu’Aristote devait être un précurseur de l’humour noir.

En épigraphe de La lucidité, vous avez inscrit : « Hurlons, dit le chien. » À la fin de l’ouvrage, il est question de nouveau d’un chien qui hurle. Pourquoi ces évocations ? 
Le chien de l’épigraphe, c’est vous, c’est moi, c’est tout le monde. C’est quelqu’un qui en a marre d’avoir parlé toute sa vie, pour qui parler ne suffit plus. Alors hurler devient une nécessité. À la fin du livre, le chien hurle parce qu’il assiste à ce qu’on peut considérer comme un crime d’État. À côté de lui, un aveugle dit avoir horreur des chiens qui hurlent. C’est une façon d’illustrer que ceux qui ne veulent pas voir la vérité en face se voilent la face. D’un point de vue littéraire, j’aime l’idée de conclure un roman sur le hurlement d’un chien. L’image symbolise la question que je pose dans tous mes romans : que signifie la vie ?

D’ailleurs dans vos œuvres, le chien est souvent un personnage à part entière, parfois doté de pouvoirs magiques.
Oui, pour moi, le chien est l’incarnation de la pureté morale. Dans La lucidité, il vient secourir sa maîtresse et lèche ses larmes. Quand je ne serai plus de ce monde, avant la fin de l’oubli de tout ce que j’ai écrit, j’aimerais que « le chien des larmes » soit toujours présent. Comme un personnage immortel. Je suis très heureux d’avoir inventé ce chien-là et de l’avoir nommé ainsi.

Vous avez participé en 1974 à la Révolution des œillets qui entraîna la chute de la dictature salazariste et n’avez jamais caché vos engagements politiques. Êtes-vous toujours membre du Parti communiste ? 
Bien sûr ! Vous vous demandez comment je peux encore être communiste presque 20 ans après la chute du mur de Berlin ? Tout simplement parce que je ne pourrais jamais être favorable au capitalisme. C’est à cause des hormones que la barbe pousse, n’est-ce pas ? Alors disons que je suis un communiste hormonal. C’est en moi. Je n’y peux rien. C’est aussi un état d’esprit. Brejnev, Staline et bien d’autres ont très vite perdu leur état d’esprit communiste. On voit ce que ça a donné...Quant à la Chine, qu’on arrête de dire qu’il s’agit d’un pays communiste alors qu’une économie ultracapitaliste s’y développe depuis des années.

Dans La lucidité, un personnage féminin se distingue par sa force morale et son insoumission. Dans Le dieu manchot, Blimunda avait la faculté de voir à l’intérieur des êtres. La plupart de vos romans mettent en scène des personnages féminins très forts. Les femmes ont-elles particulièrement marqué votre vie ? 

D’abord, j’aime les femmes. Je trouve qu’elles sont plus fortes, plus sensibles et qu’elles ont plus de bon sens que les hommes. Toutes les femmes du monde ne sont pas comme ça, mais disons qu’il est plus facile de trouver des qualités humaines chez elles que dans le genre masculin. Tous les pouvoirs politiques, économiques, militaires sont une affaire d’homme. Pendant des siècles, la femme a dû demander la permission à son mari ou à son père pour entreprendre quoi que ce soit. Comment a-t-on pu vivre aussi longtemps en condamnant la moitié de l’humanité à la subordination et à l’humiliation ? Les hommes et les femmes hier, les Juifs et les Palestiniens aujourd’hui, je suis frappé par l’incapacité des humains à vivre ensemble dans le respect mutuel. Comme si l’Autre devait nécessairement être un ennemi. L’Autre est simplement l’Autre. L’Autre est comme moi. Il a le droit de dire « je ». Nous, hommes blancs, civilisés et riches, n’acceptons pas que l’Autre dise « je ».

C’est pour leur rendre justice que vous faites cette place aux femmes dans vos romans ? 
À vrai dire, je ne le fais pas exprès. À l’heure de commencer un roman, je ne cherche pas à tout prix un personnage féminin. C’est l’histoire qui me l’impose. Quand je vois une femme arriver dans le récit pleine de force et de lucidité, je lui dis tout simplement : soyez la bienvenue.

Dans Manuel de peinture et de calligraphie, vous mettez en scène l’histoire d’un homme qui s’interroge sur les fondements de l’art. H. est un peintre qui s’accomplit par l’écriture. Vous-même, pourquoi écrivez-vous ? 
Je crois que l’écrivain écrit pour lui-même. Il n’est pas là pour sauver le monde. Tout au plus, l’écrivain établit des passerelles avec ses lecteurs. Le jour où un lecteur se reconnaît dans ce qu’il lit et qu’il pense : « Si je savais écrire, je dirais cela », alors un nouveau rapport s’établit. Le livre est un pont à sens unidirectionnel qui va du lecteur à l’écrivain et tisse un lien affectif. D’ailleurs, je trouve que dans les éditions des œuvres complètes d’écrivains, il serait bon de glisser quelques lettres de lecteurs. Ce qui est intéressant, ce n’est pas lorsque le lecteur raconte qu’il a adoré votre livre, mais quand il parle de lui. On ne peut que pleurer d’émotion. L’humanité est là, dispersée dans ces lettres.

On sait que vous êtes un admirateur de Fernando Pessoa qui vous a inspiré un roman intitulé L’année de la mort de Ricardo Réis dans lequel vous imaginez la vie de l’un de ses hétéronymes. Plus généralement, quels sont vos maîtres en littérature ? 
Si je devais composer ma famille d’esprit, j’y inscrirais Gogol, Kafka, Montaigne, Cervantès et aussi Antoniu Viél. Antoniu Viél est un jésuite portugais du XVIIe siècle. C’était un mulâtre. Selon moi, on n’a jamais écrit le portugais aussi magnifiquement. Mais si je devais choisir « mon » écrivain, je dirais sans hésiter Franz Kafka. Bien sûr il y a Faulkner, Proust, etc. Mais Kafka est, selon moi, le plus grand romancier du XXe siècle. Il a annoncé ce que nous sommes en train de vivre : l’ère de la bureaucratie totale.

Lisez-vous vos contemporains ? 
En ce moment, je lis La porte du soleil du romancier libanais Élias Khoury. C’est remarquable. J’aime beaucoup la Colombienne Laura Restrepo. En France et en Italie, je trouve moins d’auteurs qui me plaisent. Une littérature « light » a envahi les librairies. C’est bien dommage. Le problème, c’est que je n’ai plus le temps de lire. Je relis des œuvres plus que je ne découvre de nouveaux écrivains. Actuellement, je me replonge dans La vie de Samuel Johnson, de James Boswell. Un pur chef-d’œuvre.

Vos derniers romans semblent plus réalistes que les précédents. Comment expliquez- vous cette évolution dans votre écriture ? 
Je crois que L’Évangile selon Jésus-Christ (1992) a marqué un tournant. Même si presque tous mes romans ont en commun de prendre comme point de départ une situation absurde (une épidémie de cécité, un taux d’abstention record, etc.), il me semble qu’avec L’aveuglement, Les intermittences de la mort et La lucidité, je suis allé plus en profondeur dans ce que je voulais exprimer. Dernièrement, j’ai formalisé cette idée avec l’image de la statue et de la pierre. La statue représente la surface et la pierre représente la matière. Avant L’Évangile selon Jésus-Christ, je n’avais fait que décrire la surface. Après, je suis entré davantage dans l’âme humaine, là où la pierre ne sait pas qu’elle est statue.

En 1992, vous vous êtes exilé aux Canaries suite à la publication de L’Évangile selon Jésus-Christ qui, selon le gouvernement, « portait atteinte au patrimoine religieux des Portugais ». Vous n’avez jamais regretté cette décision ? 
Vous savez, je ne suis pas Salman Rushdie non plus ! À sa sortie, L’Évangile devait concourir à un prix littéraire européen, mais le gouvernement portugais a refusé d’y inscrire mon livre. J’ai trouvé ça stupide et je l’ai dit. Le problème a même été débattu au Parlement ! C’est alors que Pilar, ma femme, m’a suggéré que l’on fasse construire une maison à Lanzarote et qu’on parte vivre là-bas. Ma première réaction typique de mâle a été de répondre non. Ma deuxième réaction a été de dire : on va étudier la question. Ma troisième réaction, encore très masculine, a été de me réapproprier cette très bonne idée (rires). J’aime être là-bas, dans cette maison perdue au milieu de nulle part. Mais je n’ai jamais rompu avec mon pays d’origine. J’ai gardé une maison ici et j’y reviens souvent.

À quoi travaillez-vous actuellement ?
Mon dernier livre, Mes petits Mémoires, a été publié en décembre. Ce sont mes Mémoires reconstitués de mes 6 à 15 ans. Il est déjà sorti en Amérique du Sud, en Espagne, en Italie et devrait bientôt être traduit en français. Maintenant, j’ai une nouvelle idée. J’ai déjà commencé à prendre des notes, mais le moment de la rédaction n’est pas encore arrivé. Comme je le dis souvent, la première condition pour écrire c’est de s’asseoir. Bientôt arrivera cet instant délicieux de s’asseoir à une table et d’initier l’écriture. J’espère avoir terminé au printemps prochain. Ce ne sera ni du théâtre ni un essai...mais je ne veux pas en dire plus. Je peux seulement vous assurer qu’il s’agira d’un ouvrage difficile et aussi, peut-être, de mon dernier livre. Avec Mes petits Mémoires, c’est comme si une boucle avait été bouclée. Je croyais tenir là mon ultime livre et cela me rendait d’ailleurs très mal à l’aise. Maintenant, je sais qu’il y en aura un autre. À mon âge, ce n’est pas facile de se projeter dans l’avenir. À 70 ans, on peut encore dire « Quand j’aurai 80 ans...  ». Mais à 84 ans, que peut-on dire ?

« La mort ne vous concerne ni mort ni vif ; vif parce que vous êtes ; mort parce que vous n’êtes plus », écrivait Montaigne. Que représente la mort pour vous ? 
Comme je le répète souvent : pour vivre, il faut mourir. Mon père, ma mère, mon frère sont morts. Les faits sont les faits. On ne peut pas les contourner. Combien d’années me reste-t-il à vivre ? Trois, quatre, cinq ans ? Je n’ai pas peur de mourir, mais mon souhait serait de pouvoir écrire jusqu’au dernier jour. C’est par l’écriture que j’ai obtenu une place dans ce monde. Roger Martin du Gard disait : « Une belle vie vaut bien une belle œuvre. » J’ai la vanité de penser qu’à une belle œuvre, je peux ajouter une vie assez belle, marquée par une cohérence personnelle intègre. Un jour, l’essayiste portuguais Eduardo Lourenço a écrit que ma vie était un miracle. Je n’étais pas né pour avoir le prix Nobel. Je suis né dans une famille d’agriculteurs. J’aurais dû devenir paysan. Ma chance a été que mon père « émigre » à Lisbonne. Aujourd’hui, je suis content de mon travail et de ce que j’ai vécu. Je suis aussi très heureux d’avoir connu ma femme. J’avais 63 ans et elle 36 quand nous nous sommes rencontrés, ça a fait beaucoup jaser à l’époque. Mais c’est une femme formidable et aujourd’hui je peux témoigner que le bonheur existe."

Sem comentários:

Enviar um comentário